15.9.16

Le vide de l'être absent...



Je le regarde dans les yeux pensivement, et je me demande comment a-t-il pu changer autant ? Comment tout s'est renversé soudain en moi ? Quand est-ce ma vie est devenue une prison ? Un étranger que je découvre dans mes bras, peut-être bien que ce voile de brouillard que j'eus devant les yeux s'était dissipé. Tout se presse dans ma tête, des vérités s'écrasent une par une dans mon regard, comme les vagues qui se brisent sur les rochers. Tout change si vite soudain, je le vois sous un nouveau jour. J'essaie de retenir en un temps vaguant les peintures de nos souvenirs. Je regarde son visage, ses yeux, ses lèvres comme pour la première fois. Un ultime geste avant l'abandon, sans même lutter contre toutes mes pensées troublantes. Je sais que je n'aimerais pas mes mots, ni mes regrets. Pourtant, ils seront longtemps dans l'ombre de mon miroir, comme une punition à revivre, une image qui existera, et que je reverrai sans fin. 

Je traverse ma vie ou le semblant de cette terre amoureuse et tranquille. Je me revois entre ses mains, buvant ses mots. Hantée de sa présence. Obsédée par sa pensée, par son esprit, par son imagination débordante. J'étais encastrée dans le corps de l'amour. Piégée dans un sourire derrière la mer, entre tous nos voyages et mes solitudes. J'avais toute son absence pour le protéger. J'avais tout son temps pour le sauver. Et tous ses retours pour transformer mon attente. J'oubliais ses longs voyages dans son regard qui me dévore, lèche ma nuque, me renverse, me mange et m'embrasse. Et recommencer. Sentir ses épaules fortes, sa poitrine musclée et son ventre dur et lisse. Nos corps nus. Je m'étouffe dans sa folie, dans son désir, dans son odeur virile. Dans son monde masculin qui me fait tourner la tête. Mon corps est le moyeu brûlant de ses mains, un ouragan ravageur en mouvement.  

La douleur m'aveugle, et je m'aperçois qu'il y a des moments dans la vie où une personne qui nous a longtemps entourée de sa présence peut ne pas nous manquer ou plus, quand elle s'absente souvent de notre vie. Et que derrière moi, j'en ai laissé de bien nombreuses. Que le vide auquel j'ai eu si peur de le ressentir s'était volatilisé ou que tout simplement, les liens qui nous unissaient se sont fragilisés ou se sont défaits. 

Chacun de tes regards ne me transmet que fatigue, fuyant et rempli de doutes. Ainsi, les silences s'accumulent et apparaissent au travers de mensonges ou de demi-vérités. Même la complicité s'est évaporée. Je ne sais pas, mais je me perds entre toi et l'autre. Je te cherche dans ton visage et dans celui de l'autre, mais je ne te trouve plus. Tu es si différent. Tu es si distant. La mort se glisse partout entre nous. Partir, quitter l'ennui, la torpeur de ce silence qui ressemble à une chute. Et préférer l'absence, la distance, le seul moyen d'être en harmonie avec moi-même, et me retrouver. Moi aussi je vais changer par ton indifférence, et me reconstruire. Sans toi, sans l'autre, sans nous. 

Malgré moi, j'ai toujours été à fond dans mes relations intimes et amicales. Comme un engagement à tenir, de l'amour à offrir et à partager, et une amitié à entretenir. A vouer une attention particulière à des âmes que mon cœur a choisi. A la manière d'une maison entière dans mon cœur et dans mes mains.

J'erre sur son visage où le manque d'attention se lit, peut-être que cet air d'avoir la tête ailleurs était présent depuis toujours. Désormais, je ne sais plus. Peut-être une autre vie, ta vie ailleurs, loin de moi. Peut-être d'autres centres d'intérêts que tu ne partages plus avec moi. Ton monde invisible qui me retient loin de toi. Tu te retires si loin de moi. Tu t'arrêtes de me prêter de l'attention, à moi, celle que tu considères comme importante dans ta vie. Tu ne m'offres que des vides au lieu d'une présence attentionnée. Tu disparais dans une fumée de serments quand tu oublies souvent l'union de tes promesses. Ton arrogance vidée contre ce présent immédiat qui nous unit et nous fuit aussi. Feutrer cette attente et remettre ce grand écart à des lendemains improbables, comme si le temps nous était éternel. Cet excès déséquilibré du pacte que nous sommes éternels. La grande fragilité du moment présent qui est capable de tout. Ces détails auxquels ne requièrent plus de l'importance à tes yeux et qui dure avec le temps. Savoir être présent entièrement, non pas physiquement, mais entier avec le cœur et l'esprit. 

Cette mort lente me tue à jets de pierres, quand l'absence la plus douloureuse est celle d'un être à tes côtés et ne te communique que de l'indifférence, et un manque d'attention. Tu crois que ce n'est rien que de vivre l'enfer de la flamme à petit feu. Pourtant, des mots tendres auraient pu panser mes attentes, aimer à s'oublier dans la fièvre de la passion. Happer ces instants à moi, à nous. Et puis, tes silences, mes silences, une morgue de mots avant la crémation.

Dans un rêve une évidence qui prend forme. Certaines personnes manquent réellement d'affection ou ne savent aimer, tout simplement, sont même émotionnellement instables sans en être vraiment conscients. 

Tu apprendras à lire dans ta douleur, dans ce livre vivant et incomplet que tu as fermé précipitamment. Et tu auras la force d'écrire de plus en plus entre les lignes ta peur, ce temps sans mes gestes, sans ma voix, sans mes rires. Tu écouteras longtemps mon silence, ma patience, mon recueillement. Et ta propre trahison, à l'agonie de ce rêve à toi, à moi, à nous deux. 

"Les sentiments ne s'envolent pas comme un oiseau qu'on libère de sa cage..." Un tatouage qui restera longtemps sur ma peau, comme dans un rêve, un miracle vécu à deux. Tu étais, mon ami, mon époux, mon amant, mon compagnon de vie, mon âme sœur qui apaisait mon feu... 



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